Définir le patrimoine PROFESSIONNEL de l’entreteneur individuel en 5 minutes
Comprendre les critères, le sort des biens à usages mixtes et la preuve du périmètre du patrimoine professionnel et personnel.
Les biens relevant du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel
(Critère, biens usages mixtes, preuve du périmètre)
Le périmètre du patrimoine professionnel
Article L526-22 du code de commerce
“…
Les biens, droits, obligations et sûretés dont il est titulaire et qui sont utiles à son activité ou à ses activités professionnelles indépendantes constituent le patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel. Sous réserve du livre VI du présent code, ce patrimoine ne peut être scindé. Les éléments du patrimoine de l’entrepreneur individuel non compris dans le patrimoine professionnel constituent son patrimoine personnel.”
Le bien est professionnel au regard de son utilité pour l’activité professionnelle.
Il faut donc tenter de définir ce critère d’utilité.
L’article R 526-26 du code de commerce donne une définition plus précise
“… les biens, droits, obligations et sûretés dont l’entrepreneur individuel est titulaire, utiles à l’activité professionnelle, s’entendent de ceux qui, par nature, par destination ou en fonction de leur objet, servent à cette activité”
Un bien qui par sa nature, par sa destination ou son objet, concourt à l’activité professionnelle est professionnel. Il n’existe à priori pas de limite et pas de critère de quantification de cette notion d’utilité.
Peu importe que le bien soit utilisé ou non (critère objectif), il doit simplement être utile (critère subjectif).
De même, le bien doit être utile à l’activité mais pas forcément nécessaire voir indispensable à l’activité.
Le bien n’a pas à être utile à 100% à l’activité professionnelle. Il peut l’être partiellement. Il n’existe pas de taux d’utilisation majoritaire déterminant si le bien est personnel ou professionnel.
Le bien peut être utile ponctuellement voire rarement. Même si le bien n’est utile que rarement, il reste néanmoins professionnel.
Le statut du bien professionnel restera-t-il acquis même s’il n’est plus utilisé pour l’activité au jour de l’ouverture de la procédure et, le cas échéant, depuis plusieurs années? Un bien peut-il sortir et entrer dans le patrimoine professionnel ou toute entrée est-elle définitive?
A l’inverse, un bien qui serait dans les locaux professionnels ne sera pas nécessairement utile et il faudra veiller à ne pas nécessairement le qualifier de bien professionnel.
En cas de pluriactivité, l’ensemble des biens professionnels sont concernés. Il n’existe qu’un seul patrimoine professionnel
Exception : l’article L681-2-VII prévoit que “lorsqu’une procédure de liquidation judiciaire est ouverte, l’entrepreneur individuel peut exercer une nouvelle activité professionnelle. Un nouveau patrimoine professionnel est alors constitué. Ce patrimoine professionnel n’est pas concerné par la procédure ouverte.” Ce patrimoine professionnel est donc naturellement exclu.
Focus bien à usage mixte
Il suffit que le bien soit utile à l’activité professionnelle même partiellement pour qu’il soit professionnel. On peut considérer que c’est une volonté du législateur puisqu’un amendement ayant proposé de limiter le caractère professionnel aux biens exclusivement professionnels a été rejeté.
Donc tous les biens à usage mixte sont nécessairement professionnels
Ex: la voiture ou s’il existe un seul compte bancaire, il sera professionnel.
Le recensement des biens
L’article R526-26 du code de commerce donne la liste des biens qui sont “incontestablement” professionnels même si la liste n’est pas limitative (l’article emploie l’expression “tel que”):
“…
Le fonds de commerce, le fonds artisanal, le fonds agricole, tous les biens corporels ou incorporels qui les constituent et les droits y afférents et le droit de présentation de la clientèle d’un professionnel libéral ;
Les biens meubles comme la marchandise, le matériel et l’outillage, le matériel agricole, ainsi que les moyens de mobilité pour les activités itinérantes telles que la vente et les prestations à domicile, les activités de transport ou de livraison ;
Les biens immeubles servant à l’activité, y compris la partie de la résidence principale de l’entrepreneur individuel utilisée pour un usage professionnel ; lorsque ces immeubles sont détenus par une société dont l’entrepreneur individuel est actionnaire ou associé et qui a pour activité principale leur mise à disposition au profit de l’entrepreneur individuel, les actions ou parts d’une telle société ;
Les biens incorporels comme les données relatives aux clients, les brevets d’invention, les licences, les marques, les dessins et modèles, et plus généralement les droits de propriété intellectuelle, le nom commercial et l’enseigne ;
Les fonds de caisse, toute somme en numéraire conservée sur le lieu d’exercice de l’activité professionnelle, les sommes inscrites aux comptes bancaires dédiés à cette activité, notamment au titre des articles L. 613-10 du code de la sécurité sociale et L. 123-24 du présent code, ainsi que les sommes destinées à pourvoir aux dépenses courantes relatives à cette même activité.”
S’agissant du 5, la question peut se poser de savoir si les bénéfices générés par l’activité qui constituent les revenus de l’entrepreneur individuel sont des biens professionnels ou personnels? A lire le 5, il s’agirait de biens professionnels.
Cette analyse doit être tempérée par l’article R526-26-II qui dispose que “les documents comptables sont présumés identifier la rémunération tirée de l’activité professionnelle indépendante, qui est comprise dans le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel”.
Ex: le commerçant qui conserve des espèces importantes à son domicile
S’agit-il d’économies qui ont intégré le patrimoine personnel?
L’article R526-26 précise que “lorsque l’entrepreneur individuel est tenu à des obligations comptables légales ou réglementaires, son patrimoine professionnel est présumé comprendre au moins l’ensemble des éléments enregistrés au titre des documents comptables”
Tous les biens figurant sur le tableau des immobilisations sont donc présumés professionnels.
Focus sur l’inventaire
Le travail de vérification et de pointage des actifs par le commissaire de justice désigné pour l’inventaire est important.
Peut-être faut-il demander au Commissaire de justice, pour les biens qui ne figurent pas sur l’état des immobilisations et dont la situation est discutable de préciser les constatations pouvant faciliter la démonstration de son caractère utile. Il faut bien attirer son attention sur l’importance de ne pas nécessairement se fier exclusivement aux déclarations du débiteur pour établir l’inventaire ou de faire signer des attestations relatives à l’utilité des biens.
L’article L622-6 du code de commerce prévoit que l’inventaire concerne uniquement le patrimoine professionnel. Toutefois, on imagine qu’en cas d’ouverture sur les 2 patrimoines, il faudra aussi un inventaire concernant le patrimoine personnel.
Il est certain dans ce cas qu’il faudra 2 PV d’inventaires ou que l’inventaire devra mentionner de manière distincte ce qui relève du patrimoine professionnel et ce qui ressort du patrimoine personnel.
La question pourrait se poser de réaliser systématiquement un double inventaire (professionnel et personnel) pour permettre au MJ d’arbitrer sur l’affectation des biens.
Cela semble difficile à mettre en œuvre et contraire à l’article L622-6.
Si un actif professionnel est dissimulé dans un autre patrimoine, il faudra considérer qu’il existe une fraude et en tirer les conséquences (pénale: détournement d’actif, confusion des patrimoines/ Article L621-2,…)
Contestations
La loi instaure une présomption simple que le bien utile à l’activité est professionnel. La charge de la preuve incombe à l’entrepreneur individuel s’il souhaite le contester (Article L526-22 du code de commerce).
Concernant les biens énumérés dans la liste de l’article R526-26 du code de commerce et ceux enregistrés au titre des documents comptables, on ne sait pas s’il existerait un degré de présomption supérieur (irréfragable).
Comment?
La loi instaure un droit de reprise au profit de l’entrepreneur individuel.
La mise en oeuvre de cette action de reprise repose sur les règles de la revendication.
L’article L622-6 du code de commerce précise que le débiteur complète l’inventaire en remettant à l’AJ et au MJ
la liste des biens qu’il détient susceptibles d’être revendiqués par un tiers.
la liste des biens détenus dans le cadre de l’activité à raison de laquelle la procédure a été ouverte qui sont compris dans un autre de ses patrimoines et dont il est susceptible de demander la reprise dans les conditions prévues par l’article L. 624-19.
Le processus pourrait se présenter comme suit:
Le MJ détermine les biens professionnels grâce à l’inventaire du commissaire de justice et aux listes remises par le débiteur (mais pas seulement).
Il informe le débiteur des biens qu’il considère professionnels.
Le débiteur souhaite contester le périmètre du patrimoine professionnel et exclure certains biens au profit de son patrimoine personnel. Il doit exercer un droit de reprise dans les 3 mois suivant la publication du jugement au BODACC.
Si le MJ accepte, le bien est exclu de la procédure
En cas de désaccord, la demande est portée devant le Juge-commissaire.
On ne sait pas si ce processus peut se cumuler avec l’article L 681-2 qui prévoit que “le tribunal connaît des contestations relatives à la séparation des patrimoines de l’entrepreneur individuel qui s’élèvent à l’occasion de la procédure ouverte “